Victoire de la semaine – Annulation de deux refus de visas dans le cadre d’une réunification familiale d’un réfugié –  valeur probante des actes d’état civil étrangers

I. Faits et procédure

Une ressortissante étrangère, reconnue réfugiée par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) le 9 décembre 2015, a sollicité la délivrance de visas de long séjour pour deux enfants qu’elle présente comme les siens, au titre de la réunification familiale prévue par le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA).

Les autorités consulaires françaises, saisies en République démocratique du Congo, ont refusé les visas le 3 avril 2023, estimant que les documents d’état civil produits n’étaient pas probants quant à l’identité des enfants et à leur lien de filiation avec la requérante.

Le recours formé devant la Commission de recours contre les décisions de refus de visa d’entrée en France (CRRV) a été rejeté par une décision du 14 septembre 2023.

La requérante a ensuite saisi le tribunal administratif de Nantes, qui, par jugement n° 2313468 et n° 2313473 du 23 septembre 2024, a rejeté sa demande.
Elle a interjeté appel devant la cour administrative d’appel de Nantes, enregistrée sous les n° 24NT02978 et 24NT02979.

II. Moyens soulevés par la requérante

La requérante soutenait notamment que :

sa requête était recevable et non tardive ;

le jugement du tribunal administratif était irrégulier, les premiers juges n’ayant pas procédé à un examen particulier de sa demande ;

les décisions consulaires et celle de la CRRV étaient insuffisamment motivées et non individualisées ;

l’identité et le lien de filiation étaient établis par les jugements supplétifs d’acte de naissance et par la possession d’état ;

les décisions contestées méconnaissaient :

l’article L. 561-2 du CESEDA, relatif à la réunification familiale des réfugiés ;

l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH), garantissant le droit au respect de la vie familiale ;

ainsi que le paragraphe 1 de l’article 3 de la Convention internationale relative aux droits de l’enfant (CIDE), qui consacre la primauté de l’intérêt supérieur de l’enfant.

III. Position de l’administration

Le ministre de l’intérieur a conclu au rejet de la requête, en soutenant que les documents d’état civil étrangers produits n’avaient pas de valeur probante suffisante pour établir l’identité des enfants ni leur lien de filiation avec la requérante.

IV. Problématique juridique

La question posée à la cour était de savoir si, dans le cadre d’une demande de réunification familiale, l’administration pouvait refuser la délivrance de visas au motif que les actes d’état civil produits ne seraient pas probants, alors que ces actes sont légalisés et fondés sur des jugements supplétifs rendus par une juridiction étrangère.

V. Solution de la Cour

1. Rappel du droit applicable

La cour rappelle :

que les actes d’état civil étrangers « font foi sauf si des éléments établissent qu’ils sont irréguliers, falsifiés ou inexacts » (art. 47 du code civil) ;

que la vérification de ces actes relève de l’appréciation souveraine du juge administratif, au vu de l’ensemble des éléments produits ;

et qu’il n’appartient pas à l’administration française de remettre en cause une décision juridictionnelle étrangère, sauf en cas de fraude ou de contrariété manifeste à l’ordre public international.

2. Application au cas d’espèce

Les enfants étaient identifiés par des jugements supplétifs d’actes de naissance rendus le 31 août 2017 par le tribunal pour enfants de Kinshasa/Matete, puis légalisés. Ces décisions n’étaient pas contestées par le ministre et aucun élément ne permettait de les tenir pour frauduleuses.

La cour estime dès lors que ces jugements établissaient de manière suffisante l’identité et la filiation des enfants avec la requérante.

En considérant que ces liens n’étaient pas établis, la CRRV a commis une erreur d’appréciation et a méconnu les articles L. 561-2 et suivants du CESEDA.

3. Injonction et frais

L’exécution de l’arrêt impliquant nécessairement la délivrance des visas, la cour enjoint au ministre de l’intérieur de délivrer les visas sollicités dans un délai de deux mois, sans astreinte.
L’État est également condamné à verser à la requérante 1 200 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

VI. Portée de la décision

Cette décision présente un intérêt jurisprudentiel important pour le contentieux du refus de visa dans le cadre de la réunification familiale des réfugiés :

elle renforce la valeur probante des jugements étrangers légalisés, même lorsque les autorités consulaires ont émis des doutes ;

elle impose à l’administration une appréciation concrète et individualisée des éléments produits, sous le contrôle du juge de l’excès de pouvoir ;

elle rappelle la primauté de l’intérêt supérieur de l’enfant et le droit à la vie familiale des réfugiés.

VII. Dispositif

Annulation du jugement du tribunal administratif de Nantes (TA Nantes, 23 septembre 2024, n° 2313468 et 2313473).

Annulation de la décision de la CRRV du 14 septembre 2023.

Injonction au ministre de l’intérieur de délivrer les visas de long séjour dans un délai de deux mois.

Condamnation de l’État à verser 1 200 € à la requérante au titre de l’article L. 761-1 CJA.

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