L’interdiction des procédures dématérialisées exclusives en matière de demande de titre de séjour Jugement du tribunal administratif de Rouen du 18 février 2021

Dans la logique de la jurisprudence du Conseil d’Etat du 27 novembre 2019 affirmant que les démarches par voie dématérialisée doivent être une option pour les usagers du service public et non une obligation, le tribunal administratif de Rouen vient de réaffirmer dans son jugement du 18 février 2021 qu’en matière de demande de titre de séjour, le préfet ne pouvait prévoir exclusivement une procédure dématérialisée pour les demandes de titre de séjour quel qu’en soit la nature.

En effet, le tribunal considère que « Eu égard aux modalités de dépôt des demandes de titre de séjour prévues par l’arrêté attaqué, le préfet doit être regardé comme ayant mis en place un téléservice au sens des dispositions de l’article 1er de l’ordonnance n°2005-1516 du 8 décembre 2005 susvisée, dont il a rendu l’usage obligatoire. Il résulte toutefois des dispositions citées au point précédent que les démarches en matière de demandes de titre de séjour ont été exclues du champ d’application de la mise en œuvre des téléservices au sens du troisième alinéa de l’article L. 112-9 du code des relations entre le public et l’administration, en vertu de l’annexe du décret n°2015-1423 du 5 novembre 2015, pris en application, pour le ministère de l’intérieur, des dispositions de l’article L. 112-10 du même code. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l’article L. 112-10 du code des relations entre le public et l’administration, et de l’article 1er du décret pris pour son application, en ce qui concerne le ministère de l’intérieur, doit également être accueilli ».

Cette décision concernait un recours à l’encontre de l’arrêté du 6 mars 2020 par lequel le préfet de Seine-Maritime avait fixé des modalités de dépôt de certaines catégories de titre de séjour exclusivement par voie dématérialisée. Ce jugement est d’une assez grande portée. En effet, ce recours porté par la CIMADE, le syndicat des avocats de France, le GISTI et la Ligue des Droits de l’Homme a permis de juger illégal l’organisation de plusieurs préfectures qui obligeaient les administrés à déposer leurs demandes exclusivement par voie dématérialisée. Il en résulte que plusieurs procédures de dépôt de dossier, de prise de rendez-vous, de complément de dossier, de demande de renouvellement de récépissé faites en ligne sont illégales. En espérant que les préfectures réagissent au plus vite à cette jurisprudence et modifient leurs démarches.

 

Pour lire la décision CIMADE-Jugement-TA-Rouen-dematerialisation

Maître Fatou BABOU

Avocat à la Cour

demande de titre de séjour